Dès son premier film expérimental Greetings, De Palma ne pouvait s’empêcher de faire référence au cinéma. Quand il accède aux studios, il choisit de faire jouer contre l’avis général, l’un des héros de sa jeunesse, Orson Welles, le réalisateur de Citizen Kane. Cinéaste exigeant, il est alors dépossédé du film par la Warner qui ne comprend pas très bien ces velléités d’auteur. Revenu au cinéma indépendant, il signe un succès surprise avec Soeurs de sang qui lui permet de s’atteler à Phantom of the Paradise qui s’inspire du Fantôme de l’opéra de Gaston Leroux mais aussi du Faust de Goethe et enfin du Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde. De Palma signe ici un film transgenre qui empreinte à l’horreur, la comédie et le film musical. Le casting ne comporte pas de stars. En effet, le protagoniste le plus connu du film est Paul Williams dont la carrière est seulement musicale. Quant au casting féminin, il lance la carrière de Jessica Harper qui sera célébrée quelques années plus tard pour son rôle dans Suspiria.

Porté par une esthétique pop et une bande originale de haute volée signée par Paul Williams qui mixe les différents courants à la mode depuis plus de 10 ans, Phantom of the Paradise raconte avant tout l’histoire des cinéastes du Nouvel Hollywood qui pensaient avoir pris le pouvoir sur le système. Mais De Palma n’est pas dupe et il sait pertinemment qu’ils finiront par être assimilés et contrôlés par les studios. Le film montre ainsi que tout artiste s’il veut survivre et pouvoir jouer, doit signer un pacte faustien avec les forces qui ont l’argent et le pouvoir.

De Palma, un brin ironique, parsème son film de scènes inspirées par le Grand-Guignol où les frissons s’accompagnent souvent de rires comme dans cette séquence qui débute à la manière du meurtre de Psychose, mais se conclut avec une ventouse à toilette. Pour autant, le réalisateur fait toujours attention de traiter avec la solennité nécessaire la relation entre Phantom et celle qu’il désire.  Que ce soit la filmographie de Hitchcock ou La soif du mal, De Palma parsème son film de scènes qui reprennent des séquences célèbres du cinéma afin de dénoncer une société qui n’invente rien et préfère recycler en permanence ses créations culturelles.

Un film d’une richesse incroyable à redécouvrir absolument.

Mad Will