Staline (Gérard Depardieu) veut expérimenter la technique par laquelle « ce charlatan de Freud » réussit à extorquer aux bourgeois leurs secrets les plus intimes. Il demande à sa maîtresse Lidia (Emmanuelle Seigner) de l’aider à analyser ses rêves. Staline n’étant pas prêt à affronter la vérité, elle se sait condamnée à court terme. Elle en profite pour inciter un peintre officiel (Paul Hamy) à ne pas sacrifier son âme au service du pouvoir.

« Devant moi les volutes d’un brouillard épais, derrière moi une cage vide ». A la reconstitution historique pompière, Fanny Ardant a préféré la restitution de l’atmosphère onirique de ces vers du poète russe dissident Ossip Mandelstam. Grâce à sa mise en scène symbolique, elle vise à approcher la vérité de l’archétype. Les acteurs ne sont donc nullement grimés de façon à ressembler à la personne réelle qu’ils incarnent. Quant aux décors, ils sont dépouillés de fioritures inutiles, ce qui nous permet de nous concentrer sur quelques motifs récurrents. Lac, miroir, conte, rêves, sont ainsi autant de surfaces de réflexion dans lesquelles les personnages peuvent chercher à mieux se connaître eux-mêmes. Au-delà de sa forme intéressante et en parfaite adéquation avec son fond, Le divan de Staline est aussi un délice littéraire. Les dialogues très écrits sont rendus tout à fait naturels par la grâce du jeu des acteurs, tous excellents. Le plaisir de voir les acteurs confirmés que sont Gérard Depardieu et Emmanuelle Seigner interpréter un très bon texte se double de celui de découvrir des acteurs plus rares défendre des seconds rôles intéressants. Luna Picoli-Truffaut campe ainsi une troublante femme de chambre, tandis que Xavier Maly confère au secrétaire particulier de Staline une intelligence narquoise particulièrement convaincante. En somme, son esthétique symbolique et sa théâtralité assumée font du Divan de Staline une réflexion sur l’art des plus stylisées.

F.L.