Luigi (Edouard Baer) est un artiste papillonneur accessoirement directeur de théâtre. Il vendrait du sable au Sahara, mais se montre incapable de tenir en place plus de trois minutes pour accomplir concrètement le moindre de ses plans sur la comète. Heureusement, pour faire tourner la baraque, il peut compter sur des amis solides (Audrey Tautou, Grégory Gadebois) qui sont prêts à excuser ses inconséquences pour la part de rêve et d’aventure qu’il insuffle à leur vie.

Edouard Baer réussit un film-épopée. Une caméra mobile suit son personnage toujours en mouvement lors de longs plan-séquences pendant lesquels il joue du verbe pour mieux glisser entre les doigts de ses auditeurs envoûtés. Elle nous entraîne avec lui dans une improbable mission qui le conduit dans les endroits les plus hétéroclites de Paris, à la recherche du vrai chimpanzé réclamé par son metteur en scène japonais. Il a également entraîné dans sa course son double inversé, une étudiante de Sciences Po à la vie réglée comme du papier à musique (excellente Sabrina Ouazani). La réunion de ces deux personnages opposés n’est jamais l’occasion de faire l’éloge de l’un aux dépens de l’autre. Cette absence de parti pris de la part du réalisateur nous donne à penser que chacun a simplement choisi la vie qui lui convenait le mieux, avec ses grandeurs et ses misères respectives. Ce regard impartial sur les êtres est sans doute ce qu’il y a de plus sympathique dans ce film : on y croise une palette de caractères variés, filmés avec une neutralité bienveillante qui nous convainc qu’il faut de tout pour faire un monde.

F.L.