Carole (Catherine Deneuve), jeune femme très introvertie, vit à Londres avec sa sœur Hélène (Yvonne Furneaux). Lorsque cette dernière part en vacances avec son amant, elle se retrouve seule dans l’appartement. Des phénomènes étranges commencent alors à se manifester…

Sorti en 1965, Répulsion est le deuxième long métrage et le premier film en anglais de Roman Polanski. Ayant du mal à financer un projet plus personnel, Cul de sac, qui sortira l’année d’après, le réalisateur accepte un film horrifique. Dans une ambiance constamment tendue, on suit l’effondrement mental de Carol qui, livrée à elle-même dans ce grand appartement, n’en finit plus de sombrer dans la folie. Et si Répulsion est toujours aussi efficace plus de 50 ans après sa sortie, c’est assurément par les choix de mise en scène opérés par le cinéaste franco-polonais. Ce dernier attaque frontalement la schizophrénie de son personnage principal et décide de prendre le parti de son point de vue et de sa démence. Ou comme il le dit lui-même : Il leur fallait un film d’horreur, ils ont eu le paysage d’un cerveau. Et pour ce faire dites bonjour aux plans longs souvent serrés et à la bande sonore très travaillée. C’est d’abord elle qui dépose çà et là des jalons a priori anodins (téléphone, piano, goutte d’eau, ascenseur) qui vont, au fur et à mesure du film, tracer l’inexorable chemin halluciné que va arpenter son héroïne. Ces signaux montent rapidement en puissance à mesure que la maladie s’intensifie et c’est bientôt le décor qui se fissure pour accompagner le mouvement de bascule. Le montage achève le travail, avec notamment l’utilisation des « fondus », qui viennent accentuer cette déliquescence psychique et l’incohérence de cette nouvelle réalité dans laquelle évolue désormais Carole. En faisant de l’appartement le miroir de la folie de son personnage, Polanski réussi un film dérangeant qui entraine le spectateur dans les limbes du mental. Servi par une très belle photographie que l’on doit à Gilbert Taylor, dont Polanski avait beaucoup aimé le travail sur Dr Folamour de Kubrick, Répulsion, inaugure une sorte de trilogie des appartements maudits que continuera le réalisateur avec Rosemary’s baby (1968) et le Locataire (1976). Ours d’argent au festival de Berlin, cette première pierre à l’édifice reste toujours aussi impressionnante.

T.K.