Après un premier long-métrage, Underage, qui avait obtenu le prix du meilleur film au Festival international du film de Rio, la réalisatrice brésilienne Caru Alves de Souza continue d’émerveiller les spectateurs avec Je m’appelle Bagdad, un film énergique et touchant, récompensé du Crystal Bear du meilleur film à Berlin.

Caru Alves de Souza dresse le portrait d’une jeune fille de 17 ans, Bagdad, qui vit à Freguesia do Ó, un quartier populaire de Sao Paulo au Brésil. Cheveux courts et pantalon retroussé, là-voici sur son skateboard parcourant les rues de la mégapole.

Sa mère, Micheline, tient un salon de beauté. C’est une femme forte qui élève seule ses trois enfants, Bagdad, Joseane, adolescente intelligente qui aime séduire et voir qu’elle plaît, et Bia, une adorable petite fille qui rêve d’aller sur Mars et se passionne pour l’espace. La famille s’occupe du salon et est aidée par Gilda, une femme transgenre socialement mal perçue. Elle vit avec son ami Emilio qui souffre d’un cancer. C’est dans ce petit monde que la réalisatrice dresse le portrait de personnages féminins forts et inhabituels que cotoie Bagdad. Ceux-ci l’aideront à appréhender un monde sexiste où règne l’inégalité.

Bagdad est la seule fille de son groupe d’amis skateurs, et certains n’hésitent pas à lui prodiguer des remarques sexistes, prétextant la plaisanterie. Le monde du skate joue le rôle d’un refuge pour Bagdad mais il est aussi le reflet d’une société marquée par les discriminations et le sexisme. Bagdad va finalement faire la rencontre d’un groupe de filles qui partagent sa passion pour le skate, et, ensemble, elles vont affirmer d’une seule et même voix leur désir d’égalité et de reconnaissance.

C’est au travers de la narration d’épisodes quotidiens de la vie de ces personnages que Caru Alves de Souza mêle le réalisme et la poésie. Elle parvient ainsi à rendre compte d’histoires et de situations du quotidien vécues par des personnages d’un quartier populaire en banlieue de Sao Paulo, tout en révélant la poésie qui existe dans les situations prosaïques. Aussi, le choix du casting participe de ce réalisme. Les jeunes acteurs sont presque tous amateurs et apparaissent pour la première fois à l’écran, notamment Grace Orsato qui interprète Bagdad. Elle parvient à rendre son personnage fascinant et intrigant, à l’énergie débordante et au charme envoutant. La recherche de naturel se fait jusque dans la forme même du film, puisque Bagdad utilise de temps en temps un caméscope, qui s’affirme comme une façon de véhiculer un point de vue tout en révélant un univers intime et donnant accès au spectateur à un regard particulier.

Je m’appelle Bagdad est un film audacieux à l’énergie vibrante, qui place les femmes et la jeunesse au cœur de son propos, les confrontant à un monde où les inégalités persistent, mais où le collectif et la solidarité trouvent les moyens de s’y opposer. 

Camille Villemin