Dernière réalisation de Andreï Kontchalovski (Maria’s Lovers, Runaway train), Paradis est un film inclassable. Le réalisateur écrit le scénario d’un film de fiction tout en donnant à ses images la coloration d’images d’archives : le film en noir et blanc pousse à l’extrême le souci du détail historique. De plus il choisit des acteurs des différentes nationalités pour jouer les rôles des autochtones, afin d’éviter tout accent inopportun. Les images semblent sorties de la tête des personnages, convoqués au tribunal de l’histoire (pour les athées) ou divin (pour les croyants). On les voit se confesser, ou s’épancher, comme on voudra, sur leur vie et plus particulièrement leurs dernières années.

Il y a la comtesse russe Olga, (Ioulia Aleksandrovna Vyssotskaïa), Jules le collaborateur français (Philippe Duquesne) et l’aristocrate allemand Helmut (Christian Clauss), passé dès 1933 au parti nazi. Point de grande fresque hollywoodienne. Ici les cadres sont serrés, les figurants en petit nombre. Ce qui compte ce n’est pas la quantité, c’est l’intensité. Kontchalovski reprend à son compte l’interrogation sur la banalité du mal, sans pouvoir l’expliquer, car tel n’est pas son but. Ce qu’il souhaite, c’est que le souvenir ne s’efface pas et que l’on ait toujours conscience que le mal est en chacun de nous. Pour lui, libre à nous de lui laisser libre champ ou au contraire de le contraindre par un effort d’humanité. Que l’on soit croyant ou non n’y change rien.

Un film pour ne pas oublier.

L.S.