L’histoire d’un père devenant femme aurait pu être traité de façon lourdingue ou graveleuse. Il n’en est rien. En effet, Malou Reymann, la primo-réalisatrice danoise de A perfect family choisit de narrer avec beaucoup de tendresse l’histoire d’une femme trans, Agnete (Mikkel Boe Følsgaard), au travers le regard de sa fille cadette Emma (Kaya Toft Loholt) qui a du mal à concevoir et à accepter le changement de sexe de celle qui fut Thomas, son père. La réalisatrice ne s’attache pas ici aux états d’âme du personnage trans-identitaire, on n’en saura finalement peu sur ses motivations, mais bien à ceux de sa fille de douze ans, un âge où l’on se pose beaucoup de questions sur son corps, sa relation aux autres, sa place dans la famille et dans le monde. Une mutation d’autant plus brutale que la nouvelle du changement de sexe est forcément dérangeante pour l’adolescente qui doit composer avec le regard de ses camarades de classe ou de son club de foot où elle s’investit énormément.

Le vrai sujet du film est donc celui de l’apprentissage de cette jeune adolescente qui, élevée dans une famille aimante avec Caroline (Rigmor Ranthe), sa sœur ainée, doit faire face à l’imprévu qu’elle doit gérer du mieux qu’elle peut.

La réalisatrice ne jugeant finalement personne, fait évoluer ses personnages dans le temps afin de rendre compte des hauts et des bas qui ponctuent généralement toute relation familiale. Elle use pour ce faire de captations vidéo réalisées par le père, qui font fonction de flashbacks dans lesquels on découvre le plus souvent des images des deux sœurs, permettant ainsi à la réalisatrice de nous offrir des protagonistes bien dessinés. Seul le portrait de la mère Helle, (Neel Rønholt) est rapidement esquissé, comme si le père devenu « mère » suffisait à remplir à lui seul les deux rôles.

En grande partie inspiré de la propre histoire de la réalisatrice qui nous offre ici une leçon de vie, le film est avant tout avec ses moments tendres et drôles, une comédie rafraichissante.

Laurent Schérer