Dino Risi fut le grand maître de la comédie italienne, un genre qu'il ne cessa de réinventer en essayant dans chacun de ses films de la remettre en perspective par rapport à son époque. Passant allégrement de la satire d’une Italie fasciste dans La Carrière d'une femme de chambre , à la comédie de mœurs par le biais du crépusculaire Dernier Amour , il flirtera même avec le giallo avec les Âmes perdues . Le distributeur Les Acacias qui nous avaient permis de voir ou revoir les longs-métrages précédemment cités, continue en cette fin d'été de nous faire découvrir des pépites du réalisateur italien avec la ressortie d’un film à sketches qui aborde un sujet essentiel : Le sexe !

Avec Le Sexe fou , Dino Risi s’inspire de la comédie sexy italienne alors à la mode avec des films comme Quand les femmes avaient une queue ou Ma femme est un violon. L’essor des comédies déshabillées à cette époque est lié au fait que la censure italienne a interdit la distribution de la pornographie jusqu'à la fin des années 70. La comédie paillarde fut donc l'occasion pour certains spectateurs de se rincer l’oeil par le biais d’histoires mettant en scène un mâle souvent maladroit qui tente d’avoir des relations sexuelles avec l’héroïne le plus souvent interprétée par une actrice aux formes aguicheuses telle qu'Edwige Fenech .

Risi pour son film choisira la magnifique Laura Antonelli qui s’était fait connaître à ses débuts dans les rôles dénudés (Obsédé malgré lui de Fulci …). Un choix de casting excellent, car la superbe Laura était avant tout une excellente comédienne, à l‘aise dans tous les registres comme le prouve sa riche carrière (elle aura tourné avec Rappeneau , Chabrol , Comencini …). À ses côtés nous retrouvons Giancarlo Giannini. Acteur caméléon capable de passer d’un personnage à un autre avec une aisance impressionnante, il joue ici tour à tour l’amoureux transi, le gérontophile ou le garçon de campagne naïf. La prestation de haute volée de Laura et Giancarlo aura sans doute donné envie à un certain Visconti de les réunir à nouveau pour son dernier film L'Innocent .

Si en apparence Risi s’inspire des comédies sexy, c’est pour mieux s’en détacher en imprimant sa patte d’auteur. Fin observateur de son pays, le réalisateur étudie par le biais de la sexualité le comportement de ses compatriotes. Il met donc en lumière les différences de classes sociales dans le premier segment du film (Madame, il est huit heures !), se moque de la soi-disante virilité du mâle italien (Lune de miel) ou bien évoque la misère sexuelle (Reviens, mon lapin).  Si Dino Risi est parfois acerbe, il n’aborde jamais le sexe de façon triste. La notion de plaisir est vraiment présente dans la plupart des courts comme dans l’onirique Travailleur italien à l'étranger où le corps féminin est célébré grâce à une Laura Antonelli fantasmée comme un objet supérieur du désir. Enfin, le réalisateur peut aussi faire preuve d’une tendresse infinie dans Un amour difficile où un jeune homme tombe amoureux d’un travesti nommé Gilda. Ce sketch qui aborde la difficulté des sentiments s’avère brillant et peut-être considéré comme la pièce maîtresse du film.

Avec Le Sexe fou , Dino Risi signe un excellent divertissement qui nous fait souvent rire, nous émeut parfois, et même nous trouble grâce à la magnifique Laura Antonelli. Indispensable comme tant d’autres oeuvre du maitre !

Mad Will