Deuxième long métrage du réalisateur belge Laurent Micheli, Lola vers la mer est un film sensible et touchant qui expose les relations conflictuelles entre un père et son "fils" après la mort de leur femme et mère. C’est en route vers la mer où ils doivent disperser les cendres de la défunte afin de répondre à ses deniers vœux que Philippe, le père (Benoit Magimel),  et Lola, la fille (Mya Bollaers), devront de gré ou de force, réapprendre à se côtoyer après deux années de séparation.

L’intérêt du film réside d’abord sur l’évolution de la relation père/fille et du chemin que parcourt chacun des protagonistes pour aller vers l’autre. Quoique très bien documenté, le thème de la transidentité devient secondaire vis-à-vis de l’analyse des relations transgénérationnelles. En fait n’importe quel « problème » aurait pu servir de prétexte à l’analyse des relations parents/grand adolescent. Ce film dépasse donc l’étude d’un cas, pour en quelque sorte le banaliser. Celle qui était un fils s’appelle désormais Lola et non plus Lionel, et alors ? La construction de la féminité est une construction purement sociale. Que l’on soit cisgenre ou transgenre, il y a un moment où l’on doit tenir compte du regard de l’autre qui vous définit en tant que tel. Une femme transgenre aura finalement le même processus à accomplir qu’une adolescente cisgenre pour s’approprier la féminité.

Porté par un magnifique jeu d’acteurs, Lola vers la mer s’inscrit dans le nombre de plus en plus grand de films traitant de la transidentité (documentaires ou de fiction) et/ou faisant appel à des acteurs transgenres. Mais ce qu’il y a de plus rare c’est qu’ici ce thème, quoique central, ne phagocyte pas le film. Peut-être est-il l’une des premières pierres qui, au moins au cinéma, conduira au temps où la transidentité ne sera plus un problème mais sera une banalité comme n’importe quel récit d’apprentissage ou histoire d’amour.

Laurent Schérer