Après Benda Bilili ! qui suivait un groupe de musique congolais, Renaud Barret retourne à Kinshasa dans laquelle il déambule pour réaliser Système K.

Le Congo est un pays en grande souffrance, qui possède beaucoup de richesses mais dont la population est très pauvre. La plupart des habitants de sa capitale vivent au jour le jour, sans accès à l’eau courante ou à l’électricité.  Dans ce contexte, l’art est un luxe hors d’atteinte.

Cependant, des artistes y existent et performent à l’exemple de Freddy Timba, un sculpteur dont la renommée est maintenant internationale.  L’artiste utilise pour ses créations des objets liés à la mort : douilles, machettes, crânes de singe, et autres pièces qu’il va chercher dans les poubelles, les décharges, ainsi qu’auprès de revendeurs de matériaux et d’objets de troisième main. Il refuse d’expliquer son art, voulant que chacun se forge sa propre opinion sur son travail. D’après lui l’artiste se fond dans une population qui doit inventer en permanence les conditions de sa propre survie. Il admet avoir la chance d’être reconnu et de pouvoir vivre de son art, alors il veut « laisser la porte ouverte» à ses compatriotes créateurs qui vivent dans la misère.

Ainsi Système K dresse le portrait d’une galerie d’artistes, dont les œuvres sont synonymes de survie. Ils ont pour nom, Kill Bill, Strombo, Majestic ou Kongo Astronaute qui pour sa part se sent les pieds dans le béton et crée son costume de cosmonaute pour voir les choses d’en haut. Nous partons également à la découverte de Beni l’orphelin qui dit préférer créer que de rester à pleurer et de la compagnie Kokoko qui, pour jouer sa musique, crée ses propres instruments en matériaux de récupération. Enfin, les femmes artistes aussi sont présentes avec la figure de la peintre Géraldine Tobe qui utilise « le feu comme pinceau et la fumée comme peinture ». Pour être le miroir de leur peuple, les artistes exposent dans la rue, malgré le danger, voulant « amener leur art là où les gens en ont le plus besoin ». En effet, suite à l’exposition à un carrefour d’une maison construite à partir de machettes, la police a embarqué les spectateurs et l’artiste a subi un interrogatoire musclé le conduisant  à s’exiler quelques jours pour sa propre sécurité.

À travers leurs œuvres et leurs performances, tous ces créateurs expriment leur urgence de vivre dans un pays où la mort rode et où les superstitions et la religion s’ajoutent à la misère du peuple pour le réduire dans un nouvel esclavage.

Un film rempli d’images brutes d’un peuple au bord du chaos, qui décrivent un monde de violence et de misère mais où éclot par brefs instant, comme une fulgurance, des œuvres prodigieuses.

Laurent Schérer