Avec Super , James Gunn a signé une œuvre influencée par le cinéma indépendant américain, les séries Z de la firme Troma et les longs-métrages de super héros signés par des cinéastes comme Sam Raimi dans les années 2000. Alors que le réalisateur s’attaque actuellement au deuxième volet de la Suicide Squad pour le compte de la Warner avant de revenir aux Gardiens de la Galaxie , il est intéressant de revoir cette œuvre étrange qui nous montrait les super héros d’une manière réaliste. Super témoigne de l’intérêt de Gunn pour les hommes en collants puisque celui-ci avait écrit un scénario d’une comédie nommée The Specials autour des super héros en 2000 alors que le genre n’était pas encore forcément synonyme de carton en salles.

Mais que raconte le film ?

Frank est un homme dévasté: sa femme le trompe avec un dealer... Décidé à reprendre sa vie en main et inspiré par Dieu lui même, il prend son courage à deux mains et part éradiquer le mal des rues de sa ville. Sans super pouvoir mais avec une clé à molette, il s'en va redéfinir les règles du vivre ensemble à grand coup de lattes dans la face des méchants imprudents. Bien aidé par une acolyte encore plus folle que lui, il s'approche inexorablement de celui qui a brisé sa vie.

Mal compris à l’époque par une critique qui pensait que le film militait pour la violence et l’autodéfense, Super donne à voir les habituelles étapes  des longs-métrages de superhéros, qui permettent à un individu de prendre conscience de ses pouvoirs et de prendre sa place de vengeur dans la société. Mais ici, le réalisateur évacue tout le clinquant, le caractère mythologique inhérent au genre. Ainsi, l’appel reçu par le personnage principal qui doit l’aider à se décider à accepter son statut de superhéros se réduit ici à des rêves kitchs ou à l’apparition du Père tout-puissant dans du vomi. De plus, les actions du personnage contre le crime sont démystifiées par Gunn qui nous montre toute la violence et la bêtise de son héros qui se fait appeler Éclair Cramoisi et crie comme un ado attardé quand il frappe avec sa clé à molette des « soi-disant coupables » comme ce couple qui a grugé dans la queue d’un cinéma et qu’il laissera sur le carreau entre la vie et la mort.

Usant de nombreuses caméras à l'épaule et d’une photographie très naturaliste, le film fait irrémédiablement penser à un reportage télévisuel ou une téléréalité. Pour les francophones, impossible de ne pas penser au magazine Striptease et à l’un de ses plus fameux épisodes intitulé La soucoupe et le perroquet. Ici c’est le décalage entre le regard sur le monde du protagonsiste principal et la réalité qui crée les situations comiques souvent malaisantes.

James Gunn est un cinéaste de la double lecture. Même dans le cadre du travail avec une firme conservatrice comme Disney, il a réussi à signer le long-métrage le plus intéressant et le moins aseptisé de l’univers Marvel avec Les Gardiens de la Galaxie . Pour Super , malgré un final qui ressemblerait à un happy end, il est clair que le film montre un personnage totalement fou dont les actions n’ont servi à rien. En effet, sa femme finira par le quitter et sa jeune sidekick connaîtra un destin funeste. Entre sentimentalisme et violence extrême, James Gunn signe ici une farce caustique sur notre besoin d’exister dans notre société déshumanisée. À découvrir sur Outbuster !

Mad Will

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