Dave Garver (Clint Eastwood), disc jokey sur la radio KRML, anime une émission de radio. Un soir dans un bar, il rencontre Evelyn Draper (Jessica Walter), l’une de ses plus fidèles auditrice qui lui demande chaque jour de passer la même chanson : Misty. Après avoir passé la nuit ensemble, Dave Garver va vite prendre conscience du comportement psychopathe d’Evelyn.

Sorti en 1971, Un frisson dans la nuit ou Play Misty for me en anglais, titre beaucoup plus évocateur, est souvent considéré comme un précurseur dans le genre du thriller ayant pour thème l’érotomanie, ou plus largement les stalkers (harceleurs). Sur le thème du harcèlement et de l’obsession il annonce donc Liaison fatale (1988, Adrian Lyne), qui est d’ailleurs plus ou moins un remake du film de Eastwood et Misery (1991, Rob Reiner).

Le premier passage derrière la caméra pour l’ami Clint se fait avec le making off du film Les Proies réalisé par son mentor et ami Don Siegel, à qui il donne d’ailleurs un petit rôle dans le film. Un frisson dans la nuit est donc son premier film en tant que réalisateur de fiction et Eastwood s’inspire d’une expérience qu’il a vécue plus jeune. La force de la mise en scène repose sur un réalisme marqué. La BO, jazzy, très travaillée (Eastwood étant réputé pour être un fan, son fils est lui-même musicien) est  somptueuse. Le classique Misty d’Erroll Garner apporte un certain calme, une sérénité malaisante qui tranche avec des instants de violence frénétique. Le choix d’un traitement réaliste renforce l’horreur et accroche le spectateur qui suit avec un certain voyeurisme l’évolution du comportement d’Evelyn. Si l’histoire avance inexorablement vers un final assez prévisible aujourd’hui, le récit, parfaitement mené, installe progressivement une tension anxiogène qui contraste avec les plans magnifiques de la Californie. Et si on peut déplorer un traitement un peu sexiste des personnages féminins, qui restent enfermés dans des rapports clichés (combo Clint Eastwwod / années 70) malgré une apparente libération sexuelle, on peut aussi voir le film comme une revanche perverse de la gent féminine sur un type un macho qui consomme les femmes. Une première réalisation très inspirée qui marque le début d’une grande carrière.

M. Wade