Beaucoup de cinéastes se cherchent avant de signer leur « grand film ». Dans le cas de Romero, sa première réalisation est déjà parfaite et allait faire figure d’œuvre matricielle pour ses films à venir. Malheureusement pour le réalisateur de Pittsburgh, La nuit des morts-vivants, qui allait réinventer le mythe du zombie dans le 7ème art, ne lui rapportera pas un sou en raison d’une erreur d’enregistrement.

Pourquoi le long-métrage est une telle réussite ?

Sa dimension politique ? Tout a déjà été dit sur ce film qui serait la critique d’une Amérique ségrégationniste et la métaphore d’une société occidentale repliée sur elle-même.  On oublie cependant l’essentiel quand on évoque ce titre : c’est avant tout un grand film d’horreur. Et c’est peut-être ça le plus important ! Ainsi la vision de La nuit des morts-vivants me semble indispensable pour tout jeune réalisateur qui voudrait suivre la mode initiée entre autres par le studio A24 et réaliser un « elevated horror », terme à la mode qui désignerait un film d’horreur soi-disant intelligent qui en réalité s’avère le plus souvent dispensable.

Il faut en premier lieu aimer le genre qu’on aborde. C’est bête « dit comme ça», mais au regard de certaines interviews, il me semblait essentiel de rappeler ce point. Romero, il ne faut pas l’oublier, était un vrai amoureux du fantastique qui avait bouffé gamin un nombre incalculable d’EC Comics (BD d’horreur) tout comme son ami Stephen King. Bien sûr, c’était aussi un homme dont les convictions politiques très à gauche étaient visibles dans ses films. Mais sa force a toujours été de nous offrir en premier lieu une histoire logique avec des personnages qui fonctionnent. Actuellement, certains cinéastes pensent leur film comme un manifeste avant de se pencher sur l’histoire. Le résultat à l’écran, ce sont des personnages prétextes dont les actions sont souvent illogiques, mais dont les choix servent la cause du réalisateur. Le discours dans le cinéma de genre doit être selon moi la résultante des actions des différentes protagonistes sous peine de faire un film qui risque de mal vieillir et qui prendra le spectateur pour un idiot.

La nuit des morts-vivants est toujours aussi efficace 50 ans après sa réalisation, car le long-métrage contient, en dehors de son discours sous-jacent, des séquences d’horreur pure qui n’ont rien perdu de leur impact, à l’image de la scène où la petite fille agresse ses parents. Le film s’apparente donc à un grand huit émotionnel où nous avons peur pour les survivants avant de changer d’avis la séquence d’après en raison de l’inhumanité de certains protagonistes.  Nous sommes ici plus enclins à partager les opinions de Romero sur notre société car les actions des différents personnages nous paraissent vraisemblables. Une œuvre qui témoigne du génie de Romero dont la filmographie est à redécouvrir absolument.

Grâce au distributeur Les acacias, vous allez pouvoir revoir en salle La Nuit des morts-vivants dans une superbe copie 4K restaurée. Une pièce maîtresse du genre qu’il me semble indispensable d’avoir vue qu’on soit cinéphile, apprenti réalisateur, ou metteur en scène confirmé.

Mad Will