Tapis rouge raconte l’aventure d’un groupe de jeunes d’un quartier de Lausanne (oui, en Suisse aussi il y a des quartiers avec des jeunes défavorisés) qui décident d’écrire un scénario et d’aller à Cannes rencontrer des producteurs pour leur présenter leur projet de film. Nous suivons alors le groupe dans son voyage entre Lausanne et Cannes, trajet agrémenté de quelques pauses culturelles imposées par l’institution qui finance leur périple, puis à son arrivée à Cannes.

À lire le synopsis on craint le pire. Encore un film sur les banlieues et/ou encore un film où deux milieux sociaux se rencontrent alors qu’ils n’auraient jamais dû, provoquant des situations improbables et pas forcément drôles.

Finalement non, le film se révèle très juste, dynamique, avec des jeunes dont les comportements parfois primaires ou grégaires ne sont en rien occultés, et avec leur éducateur qui n’est absolument pas dépeint en MacGyver du social, en deus ex machina qui arrangerait tout par sa seule aura. Au contraire, les deux réalisateurs choisissent de montrer un être humain faillible et maladroit malgré toute sa bonne volonté. Le volontarisme débonnaire est peut-être d’ailleurs ce qui caractérise le mieux le film et le rend si attachant. On a beau s’arracher les cheveux devant la naïveté dont font parfois preuve les protagonistes, les réalisateurs ne font preuve d’aucun misérabilisme et ne donnent aucune leçon. Jamais ils ne se moquent de leurs personnages, et jamais ils ne les prennent de haut.

Après le documentaire, nous pouvons visionner le court métrage réalisé par les jeunes à partir de leur scénario. Surprise du chef ! Le film est loin d’être une réussite technique et reprend les clichés les plus usés du western, mais il fait preuve d’une audace rafraîchissante, notamment lorsqu’il déploie une atmosphère surréaliste qui nous renvoie au cinéma de Buñuel, au cinéma expérimental des origines, grâce auquel ces jeunes dont c’est la première expérience de réalisation racontent leur histoire en s’affranchissant des contraintes des normes cinématographiques contemporaines.

Après avoir vu ces films qui laissent une bonne place à la spontanéité et à l’invention,

il n’y a pas lieu d’être blasé en pensant « qu’on a déjà tout vu ».

L.S.