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Je vous propose de revenir aujourd'hui à une époque où Freddie Mercury enchantait les stades du monde entier avec son groupe Queen à coup de riffs endiablés. Dans les années 80, le cinéma hollywoodien misait alors sur des réalisateurs de clips dont un certain Russell Mulcahy qui s’était fait un nom dans son Australie natale avec son sanglier géant Razorback. Quant à la France, un acteur du nom de Christophe Lambert était devenu une star à Hollywood pour son rôle de Tarzan dans Greystoke. Le film Highlander allait réunir tous ces talents et nous proposer un mélange assez inédit de romanesque et de fantastique. La célèbre maxime du film "il ne peut en rester qu'un"  correspond ainsi parfaitement au premier volet d’une saga Highlander dont les suites sont oubliables.

Highlander est avant tout l’histoire d’un combat incessant entre des producteurs obsédés par la rentabilité (les suites le prouveront) et des artistes qui essayaient de mener un projet artistique jusqu’au bout. On pense au scénariste du film, Gregory Widen qui se fera déposséder de son scénario qu’il avait écrit alors qu’il était étudiant à l’UCLA. L’histoire originale était en effet très sombre et évoquait avant tout la lassitude de vivre d’un immortel. Présent sur le tournage, Widen a vu son script être modifié en permanence par des financiers qui s’attireront les foudres de l’acteur Clancy Brown (Le Kurgan) qui se retrouvera à jouer un personnage beaucoup plus basique que dans le script. Du côté de la réalisation, Mulcahy va entrer très tôt en résistance contre ses producteurs, en décidant de donner le rôle principal au frenchy Christophe Lambert. À propos d’Highlander, le réalisateur évoque un tournage guérilla où l’argent manquait toujours. Il fallait donc au jour le jour trouver des stratagèmes pour économiser. Ainsi, pour ne pas utiliser d'effets optiques, l'équipe du film décida de relier les épées à des batteries de voitures pour créer des effets d’électricité au moment où les lames s’entrechoquent. Dernier obstacle pour la réalisation du film,  l’équipe a dû s’adapter au planning plutôt serré de Sean Connery qui voulait passer le moin de temps possible sur les plateaux.

Malgré toutes ces contraintes, Mulcahy a signé un film de fantasy ambitieux et audacieux qui sera un gros succès en Europe mais qui restera totalement inconnu outre-Atlantique. Déjà en difficulté et habitué à distribuer du Chuck Norris, la firme Cannon a totalement raté la sortie américaine avec une affiche d’une laideur peu commune où l’on retrouvait une photo en noir et blanc de Lambert.

Mais que raconte le film ?

En 1536, deux clans écossais s'affrontent dans une guerre sanglante. Au cours des combats, Connor MacLeod est mortellement blessé par le cruel Kurgan. Il survit pourtant. Effrayés, les membres de son clan chassent le miraculé. Commence alors une errance infinie. Il rencontre Juan Sanchez Ramirez, un aristocrate espagnol âgé de plus de 24 siècles. C'est ainsi que le guerrier écossais comprend qu'il fait partie lui aussi de la race des élus, celle des Immortels. Il lui faut résister et traverser les siècles jusqu'au jour du «rassemblement», où l'un d'eux pourra conquérir le «prix», un pouvoir dont personne ne sait rien. Pour y parvenir, MacLeod doit décapiter tous les Immortels...

Comme dans Razorback, Mulcahy s’avère particulièrement inspiré au niveau de la réalisation. On se souvient de son utilisation sur Highlander, de caméras installées sur des câbles qui donnaient des vues aériennes splendides qui sont très proches des plans réalisés par drones actuellement. Avec son découpage travaillé, son emploi du grand-angle, ses mouvements de caméra fluides dont il abuse parfois, le film reprend le rythme effréné des clips rock de l’époque et use de cadrages dans l’esprit des comics books. Vous détesterez l’esthétique du film si vous ne supportez pas les néons, mais la réalisation typée années 80 a encore belle allure presque 40 après sa sortie. À noter que les scènes de combats à l’épée sont très bien chorégraphiées et rendent parfaitement la puissance des coups et le poids des armes. Il est à noter que le film a sans doute inspiré les créateurs de Game Of Thrones quand on voit la scène d’affrontement entre La montagne et son frère qui est une reprise du dernier combat entre Sean Connery et le Kurgan dans Highlander. Enfin, le film est précurseur en matière de montage avec un Russell Mulcahy qui utilise la plupart du temps des raccords dans le mouvement sur un objet ou un décor pour nous indiquer le passage d’une époque à une autre. On se souvient ainsi de cette caméra qui filme un aquarium à New York en 1980 et qui ensuite grâce à un mouvement vertical surgit dans un lac d’Écosse, nous faisant remonter presque 500 ans en arrière dans la vie de MacLeod .

Le film est devenu également culte pour les chansons de Queen qui donnent beaucoup de punch et de force à l’ensemble. Alors que Queen devait signer une seule chanson, le groupe est inspiré par les premières images du long-métrage et compose au final de nombreux titres tels que Princes of the Universe, Gimme the Prize ou Who Wants to Live Forever qui marqueront les spectateurs de l’époque. Le reste de la bande originale est une composition symphonique signée Michael Kamen dont le Highlander Theme est une référence en matière de composition épique au cinéma.

Évidemment, malgré tout l’amour que je porte au film, il est loin d’être parfait. Outre une esthétique marquée par son époque, le scénario du film use souvent de raccourcis parfois faciles comme par exemple en introduisant comme personnage principal féminin une médecin légiste qui s’avère par le plus grand des hasards être une spécialiste mondialement reconnue des épées. De la même manière, on se demande ce qu’a bien pu faire le kurgan durant des centaines d’années.

La grande force d’Highlander est d’être une histoire de chevalerie dans la lignée des aventures du Capitaine Alatriste d’Arturo Pérez-Reverte. Mulcahy nous offre ici un beau film de cape et d’épée où l’amitié et l’amour jouent un rôle essentiel. C’est également un film dont on se souvient pour certaines séquences très émouvantes. On pense ainsi à la scène qui montre la bien-aimée de notre héros vieillir alors que résonne Who want’s live forever de Queen. Il y a également ce très beau passage où l’on voit notre héros sauver un enfant des mains des nazis en se servant de son corps comme bouclier. Avec un sourire qui n’appartient qu’à lui, Lambert murmure alors à la gamine effrayée qui deviendra plus tard son associée : It’s a kind of magic.

De magnifiques paysages, un Lambert vraiment bon, une belle complicité entre le français et Sean Connery qui transparaît à l’écran, cette histoire originale nous change des blockbusters actuels sans émotion qui multiplient les punchlines pour faire rire le spectateur. À voir et revoir !

Mad Will