Condamné pour avoir « mis feu à un hipster », Collin (Daveed Diggs) sort de prison sous liberté conditionnelle. Alors qu’il s’apprête à achever sa dernière journée sous surveillance, ce jeune homme d’origine afro-américaine assiste à une terrible bavure policière qui vaudra la vie à l’un de ses semblables. Choqué et révolté (car la mort injustifiée de l’homme noir ne sera jamais qualifié de meurtre), Collin tente tant bien que mal de continuer sa vie et de se tenir à carreau.

Lui et son blanc bec de meilleur ami Miles (Rafael Casal) ne supportent plus la montée de la gentrification dans leur quartier dont ils se sentent de plus en plus exclus. Marre des jus détox à dix dollars, des fast food vegans et des chemises hawaïennes, ils font la guerre à la profusion de bobos dans leur Oakland natal.

 

 

Mais passé les gags sur les snobs branchés, le film présente leur lutte la plus importante qui est celle contre le racisme ordinaire aux Etats-Unis. Ainsi Miles, le personnage le plus attachant du film, est le premier à intervenir lorsqu’il s’agit de défendre son acolyte Collin. Revolver dans la poche et grillz en bouche, Miles se la joue gansta au grand damn de Collin qui traverse les rues la peur au ventre dans la crainte de croiser un flic mal intentionné. Leur amitié se verra mise en péril, tant l’un semble parfois oublier que l’autre, par sa couleur de peau, risque sa vie à chaque écart de conduite. C’est là toute la subtilité du duo, à la fois drôle et grave qui, par  l’aisance de ses interprètes, porte le film. Il faut dire qu’étant originaires d’Oakland et amis depuis le lycée (et co-auteurs du film), ces deux là sont dans leur élément.

 

 

Construit comme un film « cool » pour jeunes gens modernes, Blindspotting frôle parfois le sitcom : rap US à l’ancienne (E-40, T-Pain dans les ondes), dix vannes (souvent drôles) à la seconde, et intrigue basique sur fond de love story non aboutie. Cette légèreté dans le ton est d’ailleurs une des réussites du film : 1h35 qui passe en flèche, sans presque aucune retombée, sauf malheureusement à la fin quand le réalisateur Carlos Lopez Estrada reprend son sérieux et met en scène un face à face un peu lourdaud entre bourreau et victime. Mais c’est un premier film qui fait du bien et on acceptera volontiers cette maladresse.