On connaît Nicolas Maury par sa performance d’acteur dans la série dix pour cent. Avec Garçon chiffon , il passe avec bonheur derrière la caméra dans un film qui parfois nous agace mais nous laisse au final un sentiment d’apaisement.

 

La critique :

Jérémie Meyer (Nicolas Maury) est un acteur trentenaire maladivement jaloux allant jusqu’à installer une caméra cachée pour surveiller Albert (Arnaud Valois), l’homme avec lequel il vit. Il cherche pourtant à se soigner mais rien n’y fait, la jalousie reste prégnante et déteint sur sa vie personnelle. Sa vie professionnelle n’est pas non plus au plus haut. Il décide alors de retourner chez sa mère Bernadette (Nathalie Baye), auprès de laquelle il pense se ressourcer et trouver peut-être soin et réconfort.

 

 

Ce qui est admirable dans ce film c’est sa délicatesse. À la fois acteur et réalisateur, Nicolas Maury  ne tombe pas dans ce qui est parfois le défaut de la double casquette, c’est-à-dire la mise en valeur du personnage/acteur par un surjeu obsédant. Au contraire, alors que le film est habité par son réalisateur-acteur et intègre beaucoup d’éléments autobiographiques, Maury nous présente un personnage mélancolique, presque en retrait. Jérémie est touchant par son effacement, paradoxal pour un personnage d’une telle jalousie, comme si celle-ci était l’expression à l’air libre de sentiments rentrés et inavouables. De plus, les passages comiques, voire burlesques, sont toujours liés aux circonstances extérieures, comme pour renforcer l’étrangeté d’un monde dans lequel Jérémie a du mal à trouver sa place.


 

Si le film est une réussite, c’est en particulier grâce au jeu tout en finesse et en mélange des genres de Nicolas Maury. Il sait à la fois user du comique des situations et faire ressortir tous les aspects du (mélo)drame, que ce soit le tragique de la rupture ou bien le comportement parfois pathétique de cet homme qui a du mal à se débarrasser de ses obsessions. Il y arrive parce que son jeu n’est jamais outré, au contraire : il utilise des gestes, des mimiques, des intonations qui permettent au personnage de faire corps avec sa névrose sans que le spectateur ne s’en moque.

Accompagné par une musique originale d’Olivier Marguerit, ce film mélancolique et tendre s’apprécie si l’on accepte de naviguer sur les flots (Jérémie pleure beaucoup) d’une aventure émotionnelle particulière, celle de Nicolas Maury. On attend avec impatience son second film pour voir le primo-réalisateur transformer ce bel essai riche en intentions.

Laurent Schérer

La bande-annonce :