Internée de force après avoir consulté une psychologue d’un centre médical à l’éthique douteuse, Sawyer Valentini (Claire Foy, reine de The Crown) doit cohabiter pendant sept jours avec des malades mentaux. Parmi le personnel médical, elle reconnaît David Strine, le harceleur qu’elle a fui en venant s’installer à Boston. Avec l’aide d’un autre détenu, la jeune femme tente de faire valoir ses droits pour échapper à l’asile et à ses détraqués.

Sawyer est-elle victime d’une machination ou réellement sujette à des troubles psychiatriques ? Steven Soderbergh brouille les pistes en présentant son personnage principal comme une jeune femme tourmentée sans être complètement dingo. Mais puisque que la folie rend fou, sa dégénérescence est quasi immédiate au contact des vrais malades. Sawyer devient alors un personnage auquel il est impossible de se fier, et le spectateur n’a d’autres choix que de sans cesse virer sa cuti.

Filmé à l’iPhone 7, tantôt façon caméra cachée, tantôt façon found footage, (procédé laissant penser à des images récupérées) Paranoïa redouble de réalisme. Comme nichée dans les recoins, sur les tables et dans les chambres d’un hôpital des plus déprimants, la caméra faussement de fortune (agrémentée de divers objectifs) saisi la folie au plus près.

A ce thriller des plus inquiétants, Soderbergh ajoute une dimension politique, en pointant du doigt le système médical américain à qui il reproche de s’inquiéter de sa santé financière avant celle des patients. Mais l’aspect sans doute le plus intéressant du film, est l’immersion totale au cœur du syndrome paranoïaque dont le délire de persécution peut faire partie. Sawyer est persuadée d’être harcelée par un dangereux psychopathe, qui, comme le suggère l’apparition de Matt Damon en conseiller de sécurité, pourrait utiliser les réseaux sociaux pour espionner sa proie.

Face à des acteurs encore peu connus du grand public, le spectateur est d’autant plus noyé qu’il n’a aucun visage à qui s'accrocher, si ce n’est ce rôle furtif de Matt Damon qui apparaît aussi vite qu’il disparaît, et à qui on a envie de crier « non, ne me laisse pas ! », avant de se retrouver comme Sawyer, abandonné au milieu de l’effrayant et déroutant Paranoïa.

S.D.