Persuadée que les petites filles manquent encore trop de modèles de femmes scientifiques, la réalisatrice Marie Noëlle a eu la bonne idée de réaliser un film retraçant la vie de Marie Skłodowska-Curie (Karolina Gruzka) durant les cinq années qui ont suivi la mort de son mari (Charles Berling), pendant lesquelles elle a donc dû se battre pour faire reconnaître sa légitimité intellectuelle propre. Le résultat est un biopic particulièrement enlevé grâce à deux principaux atouts : le casting et la créativité de la photographie.

   Même si l’interprète principale est sans doute trop jeune et trop jolie pour le rôle, et qu’elle n’est donc pas complètement crédible en chercheuse déjà chevronnée, elle possède néanmoins assez d’aplomb et de malice pour suggérer à merveille les qualités de Marie Curie que Marie Noëlle voulait fort à propos souligner. En outre, l’espiègle actrice est entourée par des compagnons dont on aime retrouver à l’écran les visages sympathiques et le jeu généreux : le tendre Charles Berling, le chafouin André Wilms, la passionnée Marie Denardaud, le séduisant Arieh Worthalter.

   Pour traduire à l’image le thème-clé de la radiation, Marie Noëlle a travaillé avec son chef opérateur Michael Englert, à l’aide de miroirs et de verres dépolis, à créer des jeux d’irisation au rendu diamantin. Cette radieuse photographie est incontestablement la valeur ajoutée de Marie Curie, dont les deux génériques composés autour de la « Radium Dance » de Loïe Fuller, vaudraient presque à eux seuls le détour.

   Alors que l’on a généralement raison d’être suspicieux devant les biopics, Marie Curie déjoue les mauvais pronostics, en ne commettant pas l’erreur de mettre dans la bouche de son personnage des envolées beauvoiriennes avant la lettre, mais en préférant appuyer le point d’honneur que la grande scientifique mettait à valoriser ses filles et à les pousser en avant. Intelligent.

F.L.