« Ça va encore être des pauvres qui tapent sur des pauvres ! », ironise un CGTiste enfiévré alors qu’ouvriers et flics s’affrontent des deux côtés du portail d’une usine en voie de délocalisation en Tunisie. Montrer la proximité entre deux mondes censés être éloignés l’un de l’autre, c’est justement le principal pari du réalisateur tunisien Walid Mattar. Pour ce faire, il filme les « trajectoires en miroir » d’un ouvrier du nord de la France qui aimerait se reconvertir en pêcheur (Philippe Rebbot) et de son homologue du nord de la Tunisie qui rêve d’une autre vie de l’autre côté de la Méditerranée (Mohamed Amine Hamzaoui). Sans didactisme appuyé, Walid Mattar nous attache à ses personnages. L’humanité que l’on ressent pour eux contraste avec l’inhumanité bureaucratique qu’ils subissent tous les deux, puisqu’au-delà de leurs différences géographiques, ils appartiennent tous les deux à la même classe sociale, non considérée, abandonnée à elle-même et au système D. Racontant les conséquences d’une délocalisation dans le quotidien des gens, Vent du nord n’est pas militant mais subtilement politique.

F.L.