Blast of silence, premier film réalisé par Allen Baron en 1961, est un polar noir et étouffant, dont l’action se situe autour de Noël dans un New York empli de brumes et de fumées de cigarettes. L’ambiance, qui devrait être festive, soulignée par les guirlandes, la danse, les cadeaux et autres accompagnement de la nativité est au contraire lugubre. Frankie, le personnage principal, un tueur à gage joué par Allen Baron lui-même, est réduit à sa plus simple expression, dans tous les sens du terme. Pas de portrait psychologique, des réflexions et dialogues rares et pour couronner le tout une voix off qui s’adresse au personnage à la deuxième personne comme dans La modification que Michel Butor écrivit en 1957. Ce film semble être au cinéma ce que le nouveau roman était à la littérature. L’histoire nous importe peu finalement lorsqu’on a compris qu’il s’agissait d’un film sur l’impuissance d’un homme qui ne maîtrise pas son destin. Impuissance à mener sa mission à bien, impuissance sexuelle et impuissance à se raconter finalement puisque la voix narrative n’est pas la sienne et semble au contraire le contraindre à agir contre sa volonté. Rappelons que ce film fulgurant est un des films culte de Martin Scorsese. Malheureusement Allen Baron après deux longs métrages ne réalisera plus que des épisodes de série télévisée (La croisière s’amuse, Sheriff fait-moi peur par exemple). Une raison de plus pour ne pas manquer la ressortie de ce film sur grand écran.

L.S.