Un TGV, des zombies, et un budget de 10 millions de dollars*.

Au final, l’un des meilleurs films d’infectés de ses dernières années, le bien nommé Dernier Train pour Busan signé par le coréen Yeon Sang-ho

Sorti en août 2016, Busan confirmait après The Strangers de Na Hong-Jin, toute l’inventivité, le dynamisme en matière de création cinématographique du pays du Matin calme.

Ce film de morts-vivants est l’œuvre de Yeon Sang-ho, réalisateur d’animation qui s’est fait connaître dans les festivals spécialisés avec The King of Pigs. Ce dessin animé dénonçait les humiliations vécues pendant leur adolescence par de nombreux coréens qui devenaient plus tard des adultes brisés.

L’homme signa par la suite, toujours en animation, Fake qui dénonçait la manipulation des masses et enfin Séoul Station diffusé au festival d’Annecy dont le discours social glaçant évoquait déjà la figure du zombie.  

Avec ce Dernier Train pour Busan, il quitte le monde de l’underground pour une production plus cossue tournée avec des stars coréennes. Cinéaste à l’univers torturé, on pouvait craindre que Yeon Sang-ho perde sa verve dans ce type de production. Au regard du résultat, on voit que le metteur en scène a su concilier son discours très à gauche avec un récit haletant quelque part entre le cinéma catastrophe et les métrages d’action survitaminés. 

Mais que raconte le film :

Seok Woo, cadre toujours débordé, a peu de temps à consacrer à sa fille, Soo-an. C'est pourquoi il accepte d'accompagner l'enfant, qui veut rendre visite à sa mère, dont Seok Woo a divorcé, à Busan. Le père et la fille se retrouvent dans un TGV qui doit les conduire à Busan. Mais une épidémie frappe le pays, transformant ses victimes en zombies affamés. Une jeune femme contaminée est entrée dans le train et commence à répandre le virus parmi les passagers. C'est bientôt la panique à bord...

Yeon Sang-ho place une microsociété face à une situation en crise pour s’adonner à un jeu de massacre de la société coréenne contemporaine. Les dissensions entre les survivants du train soulignent l’incapacité d’une société divisée en classe à vivre ensemble.  En faisant du chef d’entreprise et du trader des personnages à l’égoïsme patent, le cinéaste montre que le libéralisme est plus carnassier et destructeur que les hordes de zombies.

Film autour de la rédemption qui flirte avec le mélodrame, Busan emploie des archétypes qu’il humanise au fur et à mesure. Loin du cynisme des productions Disney, le film parle d’amour et de fraternité à travers le portrait d’un père qui accepte ses responsabilités. C’est l’émotion qui est le moteur de l’action de Busan et qui fait de ce long métrage coréen une œuvre autrement plus habitée que la majorité des blockbusters américains.

Pour un premier long-métrage live, Yeon Sang-ho fait preuve d’une maitrise technique et une direction d’acteur plus qu’impressionnante. Usant d’un décor qui fait partie du quotidien, les étagères porte-bagages, les couloirs, les toilettes deviennent dans le film des éléments dramatiques qui construisent le suspens.

Grâce à une mise en scène d’une grande lisibilité qui s’appuie sur un découpage précis, le film ne perd jamais son spectateur dans l’espace. Le long-métrage nous plonge dans l’action aux côtés des personnages principaux.

Gérant parfaitement son unité de temps et de lieu, Busan est un spectacle total qui témoigne d’un cinéma coréen capable de produire des films populaires mais aussi haletants, engagés, avec des personnages toujours parfaitement interprétés. À voir absolument !

Mad Will

* Ce chiffre peut laisser rêveur quand on sait que Les visiteurs 3 a couté plus du double du film même s’il est évident que Christian Clavier a plus d’arriéré d’impôts à payer que les acteurs coréens de Busan