Après le très bon mais aussi très décrié Horns sorti en 2013, Alexandre Aja revient avec La 9e vie de Louis Drax. Adaptation par Max Minghella (l’un des acteurs de Horns) d’un roman de Liz Jensen, le dernier long métrage de Alexandre Aja tourné en 2015 n’aura pas réussi à atteindre les cinémas. Initialement la propriété de Miramax qui a décidé après des projections test très favorables de tenter une sortie en salles, le film s’est perdu dans les limbes de la distribution après la mise en vente de la société. Finalement racheté par beIn, le projet d’exploitation a été abandonné et le film sort aujourd’hui directement en DVD et VOD.

Louis Drax c’est un garçon de neuf ans qui enchaine les accidents domestiques plus ou moins graves. Après avoir chuté d’une falaise (accident gave donc) il plonge dans le coma. Un jeune neurologiste tente alors de le faire revenir à la vie alors que la police enquête sur les circonstances du drame.

Sans rentrer dans la caricature, le réalisateur culte de La colline a des yeux et de Haute tension (entre autres) est plutôt un habitué des histoires glauques aux ambiances tendues et aux développements pour le moins violents. C’est sans doute pourquoi la lecture du synopsis laisse a priori un peu songeur quant à la manière dont Aja va réussir à imprimer sa patte dans ce qui ressemble à un thriller sur fond d’histoire d’amour. Mais ce serait faire l’impasse sur la faculté du réalisateur à raconter des histoires et sur sa maitrise du récit.

C’est d’ailleurs la première chose qui frappe dans le film : le sens de la narration et le parfait équilibre entre le thriller et la fable. Tressant les flashbacks et jonglant entre différents niveau de lecture (conscient/inconscient) avec une grande maestria et un vrai sens du rythme, l’histoire ne pâtit jamais de cet enchevêtrement narratif qui vient parfois dans certaines productions masquer un scénario complétement bancal (au hasard la série Westworld). Mieux, elle est parfaitement justifiée par la mise en scène en forme de conte (cohérent car point de vue d’un enfant) qu’épouse Aja. Mais le plus intéressant reste sans doute l’aspect « Stephen King » du scénario. À l’instar de l’œuvre du maître de l’horreur, un simple élément fantastique implanté dans un environnement réaliste permet au genre d’étudier les rapports humains ou d’appréhender une situation sous un angle différent. Ici, à l’appui du récit il permet de très belles séquences oniriques. Ce réalisme magique qui se développe depuis Horns (adaptation d’un livre de Joe Hill, le fils de King) permet de créer une ambiance très particulière, plutôt inquiétante, qui vient contrebalancer l’aspect plus léger du conte. Et même si Aja se défend de l’avoir fait volontairement (voir l’interview de Mad Movies - Juin 2017) cet aspect du récit fait toute la force du film et permet un voyage très réussi, d’autant plus fort que sous le « vernis » du genre, appliqué malgré lui par un enfant de 9 ans, la cruauté de la réalité suinte.

Malheureusement inédit en salles, le film est actuellement disponible en DVD chez Carlotta et en VOD.

T.K.