Dans la vallée de l’Hudson, deux jeunes hommes sillonnent les routes à bord d’une voiture. The strange ones s’apparente à un road movie sans destination, si ce n’est une cabane au fond des bois où s’installent brièvement Sam, un adolescent de 14 ans, sous les commandes du robuste Nick qui paraît bien plus âgé. Qui sont ces deux jeunes hommes ? S’ils sont deux frères en vacances comme ils le prétendent, pourquoi frissonnent-ils à l’approche des voitures de police ? Le doute s’installe au fur et à mesure des rencontres faites en chemin. Grâce aux décors en perpétuel changement, les garçons s’inventent une nouvelle identité à chaque étape, baladant ainsi le spectateur entre le vrai et le faux, entre le passé et le présent. Seul un chat noir ayant appartenu à Sam lie les deux temporalités. Le film ne dévoile ses réponses que par bribes, par des images mystérieuses d’un homme gisant au sol, tandis que Sam se tient devant une maison en flammes. C’est par ce garçon d’apparence fragile et traumatisé, finalement recueilli dans un centre de redressement où il pourra enfin se reconstruire en racontant son histoire, que le récit est majoritairement mené.

The strange ones est un sombre thriller qui parvient à parler d’amour tout en abordant les thèmes difficiles de l’abandon et de la maltraitance. Le scénario séduit, l’image aussi, mais il manque sans doute une mise en scène plus affirmée (qui contrebalancerait la beauté naturelle de l’Hudson) et des personnages plus aboutis pour que le film, trop court, dépasse une pieuse citation des fuites en duo de La Balade Sauvage et Midnight Special.

Christopher Radcliff et Lauren Wolkstein maîtrisent l’art du trouble, le film se vit comme un cauchemar dans ce qu’il peut avoir de fantastique et anxiogène dont il vaut finalement peut-être mieux ne pas se réveiller, tant la réalité se révèle plus sordide encore.

S.D.