Adua et ses compagnes est un film du réalisateur italien Antonio Pietrangeli. Sorti en 1960, il ressort ce 31 janvier dans une superbe version restaurée où nous retrouvons Simone Signoret, Emmanuelle Riva, Sandra Milo, Gina Rovere et Marcello Mastroianni dans leurs jeunes années.

Pietrangeli n’est pas le plus connu des réalisateurs du néoréalisme italien, mais il a néanmoins produit une œuvre intéressante de 10 longs métrages dont Adua est le cinquième. Sans s’attacher à la forme prônée par le néoréalisme, il en reprend cependant l’engagement social commun et s’attache à la condition féminine, thème récurrent chez lui.

Ce film met en scène quatre prostituées qui, après la fermeture des maisons closes par la loi Merlin de 1958, s’associent pour ouvrir un restaurant.

Pietrangeli prend ce prétexte pour, d’une part, nous faire connaître le sort peu enviable de femmes qui entachées par leur passé n’ont pas la possibilité de se refaire une nouvelle vie, d’autre part pour sonder des problématiques liées à leur féminité, et les rôles, souvent contradictoires, que la société voudrait qu’elles y jouent. Par ce biais, il souhaite nous montrer ce qui est propre à tout être humain : les contradictions internes liées à un bouleversement d’une certaine routine et la peur du changement contre l’espoir d’une vie meilleure.

Et c’est bien là toute la force du film. Pietrangelo ne schématise pas ces femmes en les enfermant dans leur statut, il leur donne une vraie épaisseur, les différencient pour nos offrir de vrais personnages dramatiques. Elles passeront donc par des moments de solidarité, réunies par le travail qu’elles ont choisi, de farniente au soleil entre deux services, ou de disputes quand l’une ou l’autre choisira de rompre ces moments de solidarité par des relations avec un homme extérieur, amant, fiancé ou enfant.

Au moment où le débat sur le statut de la femme est remis sur la place publique par les événements que l’on connaît, ce long-métrage apporte une analyse d’une grande finesse qui malgré ses 58 ans en font toujours un film d’actualité.

Laurent SCHÉRER